La soumission de principe de légalité est absolue dans son
principe mais relative dans son application. C'est-à-dire qu’il y a une
certaine flexibilité dans l’obligation qui pèse sur l’administration pour
respecter et appliquer la légalité administrative.
Il y a toujours une certaine marge de manœuvre
d’appréciation pour agir ou ne pas agir. Ensuite choisir les moyens d’actions
propres à la situation.
Section 1 : L’impératif de légalité
1)
Conséquences pratiques du respect de
légalité
a)
Le
respect de la hiérarchie des normes
Il faut aussi et toujours regarder l’autorité pratique qui
met en place la norme juridique, mais aussi le respect de l’autorité qui met en
place la norme.
Cela veut dire que l’autorité de la norme juridique, dépend
aussi de la place de son auteur dans la hiérarchie des autorités publiques. S’il
s’agit d’une autorité inférieure, elle doit respecter nécessairement l’autorité
supérieure. (Le maire ne peut pas mettre en œuvre une vitesse de 60 km/h en
ville, en revanche il peut aggraver la situation, 30km/h).
La hiérarchie des normes se couplent avec la hiérarchie des
autorités.
Le pouvoir
hiérarchique s’exerce au sein d’une même personne morale de droit public.
Le supérieur hiérarchique peut modifier et remplacer la décision de son
subordonné, sauf si un texte interdit à une autorité supérieure cela.
La hiérarchie des normes doit ainsi être complétée par la
hiérarchie des autorités administratives. Par conséquent, les textes
attributifs de compétence sont donc déterminants, pour appliquer la norme, mais
aussi pour savoir si un pouvoir hiérarchique est ou non écarté.
Le pouvoir de tutelle
concerne deux personnes morales distinctes. Il est toujours prévu par un texte.
Le texte prévoit que la tutelle peut modifier la décision de l’autorité
inférieure et par conséquent revenir sur la décision antérieure.
Il n’y a plus de tutelle administrative sur les actes
administratifs locaux, seulement contrôle a postériori.
Ce respect de la hiérarchie des normes permet de souligner
qu’en pratique, un rapport de compatibilité
entre les normes et surtout au niveau national. Si l’avancement est prévu
par échelon, il faut respecter cela. Rapport de compatibilité dans les règles
de droit, mais aussi communautaire et international.
Ce rapport de conformité est aussi très important en
pratique pour le respect de la hiérarchie des normes.
b)
La
distinction fondamentale entre le pouvoir discrétionnaire et la compétence liée
de l’administration
Cela montre la flexibilité dans le respect du principe de
légalité, c'est-à-dire une liberté d’appréciation offerte à l’administration
quand elle veut intervenir.
Même en compétence liée, il y a une flexibilité, comme le
délai pour agir.
Walie a indiqué que si il fallait donner une définition du Droit
Administratif : Il est essentiellement l’étude du pouvoir discrétionnaire
des autorités administratives et de sa limitation en vue de la sauvegarde du
droit des tiers. (Quelle marge de
manœuvre faut-il laisser aux autorités administratives ?)
1) Définition du pouvoir
discrétionnaire
Une autorité administrative dispose d’un pouvoir
discrétionnaire lorsque la loi en lui donnant une compétence, la laisse libre
d’apprécier en fonction des circonstances, si elle doit utiliser cette
compétence et comment elle doit l’utiliser. (agir ou ne pas agir, et un choix
entre plusieurs solutions légales).
Le jury d’examen ou de concours est libre d’apprécier la
valeur du candidat, notation qui ne peut aller que de 0 à 20.
Le pouvoir discrétionnaire n’est pas arbitraire dans la
mesure où la marge d’appréciation doit entrer dans le droit applicable. Par
conséquent, l’opportunité d’agir, de choix, doit être aussi justifiée.
On trouve aussi ce pouvoir en matière d’urbanisme, le choix
d’un tracé d’autoroute, le choix de construire un nouveau complexe, adaptée aux
réalités concrètes.
Il faut noter cependant que le pouvoir discrétionnaire se
décompose toujours en plusieurs éléments :
- Une base
légale : il donne une compétence
- Un
encadrement textuel quant au choix de l’autorité administrative.
- Une
nécessaire adaptation à la réalité concrète du moment.
2) Définition de la
compétence liée
Il y a compétence liée lorsque l’autorité administrative est obligée d’agir et dans un sens précis.
Il n’y a donc pas de marge de manœuvre.
Par exemple, le fait
d’être titulaire d’un BAC, donne le droit de s’inscrire à la FAC : c’est
une compétence liée.
Même chose en matière
d’urbanisme, lorsque le plan local d’urbanisme prévoit une zone inondable, non
constructible, le Maire doit refuser le permis (compétence liée).
La compétence liée peut se combiner avec un pouvoir
discrétionnaire :
- En matière de police administrative, c’est une
règlementation pour éviter des troubles. Il y a une compétence liée car il faut
garantir aux administrés le bon ordre. Mais pour l’assurer, il a le choix des
moyens, il peut choisir la mesure la plus adaptée à la situation concrète.
3) Le contrôle du pouvoir
discrétionnaire par le juge administratif (limites).
Ces techniques ont été mises en place par le juge
administratif, après les PGD, par deux techniques :
- Erreur manifeste d’appréciation :
Arrêt Lagrange de 1961.
Le juge a voulu contrôlé les motifs de faits, retenue
par l’autorité administrative dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire.
Contrôlé de la qualification juridique des faits. Ne peut concerner qu’une erreur manifeste d’appréciation.
Ces techniques font craindre à l’administration, que si elle
n’a pas étudié suffisamment les conséquences juridiques données au fait, sa
décision sera annulée.
Pour la jurisprudence
Lagrange, il s’agissait d’un reclassement de Mr Lagrange, le maire estimait
qu’il y avait une équivalence entre Garde Champêtre et Cantonnier :
- le Conseil d’Etat, qu’il n’y a pas erreur manifeste
d’appréciation, lorsque l’administration reconnait cette équivalence.
Par conséquent, à partir
de cet arrêt on a vu qu’il suffit qu’il n’y ait pas de disproportion manifeste,
entre la décision prise, et les faits provoqués.
Deux arrêts rendus le 26 juillet 1978 :
- Mr Vinolay : DGS à la champ d’agriculture
du Gers, révoqué de ses fonctions pour défaut de diligence et de rigueur dans
l’envoi de son rapport annuel. Le Conseil d’Etat estime qu’il y a une
disproportion manifeste entre la faute reprochée à Mr Vinolay et la sanction
retenue. Les manquements du Directeur, appelant certes à une sanction mais
moins grave que la révocation.
- Mr Cheval : Officier de Police Judiciaire,
qui passait son temps au café, sanction proportionnée à la faute. Il n’y a pas
d’erreur d’appréciation.
Le juge retient cette technique aussi en matière
d’urbanisme : atteinte au site par une construction.
- Pour la deuxième technique, il va contrôler seulement un bilan coût
avantage : et Arrêt d’assemblée du Conseil d’Etat le 28 mai
1971 : Ville Nouvelle Est
Construction d’un nouveau campus universitaire et d’une
ville nouvelle. Ce projet entrainait l’expropriation et la démolition de plus
de 250 maisons d’habitation.
Considérant qu’une opération ne peut être légalement déclaré
qu’une utilité publique, que si les atteintes à la propriété, le cout
financier, et éventuellement les inconvénients d’ordre social qu’elle comporte,
ne sont pas excessif, mais gare à l’intérêt qu’elle présente. (coût-avantage).
- Bilan
positif, utilité incontestable, l’ont emporté sur les inconvénients, (ramené à
88 logements).
Bribant : Ce qui
importe, est que le contrôle permette de censurer les décisions arbitraires,
déraisonnables ou mal étudiées, et qu’il oblige les collectivités à présenter
aux administrés d’abord, et ensuite le cas échéant, au juge des justifications
sérieuses et plausibles de leurs projets
Cette technique du bilan cout avantage a été étendue à d’autres domaines (autre que
urbanisme), et en particulier, en matière de police des étrangers, vis-à-vis
des mesures d’expulsions.
Arrêt du 19 avril
1991 : Belgacem. Le Conseil d’Etat relève un bilan négatif en estimait que
si l’intéressé s’était rendu coupable de plusieurs vols en 1980-1982, compte
tenu de son comportement correct, ultérieurement, la mesure d’expulsion a, eu
égard à la gravité de l’atteinte portée à l’avis familial, dépassé ce qui était
nécessaire à l’ordre public.
Arrêt du 19 avril
1991 : Babas : Bilan positif, en soulignant qu’il n’y a pas
d’atteinte disproportionnée, au droit de l’intéressé au respect de sa vie
familiale, par rapport au but en vue desquels a été la reconduite à la
frontière.
On ne parle plus d’un
contrôle cout avantage, mais d’un contrôle de proportionnalité :
Moustakuim :
Contrôle de proportionnalité des mesures d’éloignement.
C’est un contrôle in
concreto : car le juge regarde la situation de fait et les conséquences juridiques de la situation
de fait.
L’erreur manifeste d’appréciation est un contrôle minimum car le
juge ne va sanctionner qu’une erreur grossière, qu’une disproportion
manifestement différente.
Contrôle de proportionnalité : Contrôle normal : Le juge
regarde la disproportion entre la situation de fait retenue et la décision
prise.
Section 2 : Les atteintes exceptionnelles à la légalité
Dans certains cas (crise, guerre), il est très difficile
pour les autorités administrative de concilier la légalité administrative, la
continuité des services publics, et assurer l’ordre public.
La jurisprudence et le législateur ont reconnu en période de
crise, qu’il y avait une nécessité à assurer d’abord la continuité des
services publics, et l’ordre public, ces deux éléments devant l’emporter
sur la légalité.
On remplace une
légalité normale par une légalité d’exception : Cela veut dire que le
principe de légalité est absolue, il demeure, mais son application est
assouplie, c'est-à-dire son contenue va être assoupli, parce qu’il faut
faire prévaloir la continuité des services publics et le bon ordre.
Il y a donc deux régimes d’exceptions :
- Un régime
jurisprudentiel, c’est le juge qui a reconnu l’assouplissement du contenu de la
légalité.
- Un régime
textuel, pour garantie la continuité ou l’ordre public.
1)
Régime jurisprudentiel dégagé par le
juge lui-même.
Lié à la première guerre mondiale, suite à une crise, un
cataclysme, pour assouplir le contenu du principe de légalité administration
a)
Les
conditions d’application révélées par la jurisprudence.
Deux arrêts à retenir :
- Arrêt du
Conseil d’Etat du 28 juin 1918, Heyriès. Il s’agissait de la révocation d’un
fonctionnaire justifié par le fonctionnement du service public, révocation
immédiate, atteinte à la légalité.
- Arrêt du
28 février 1919, Conseil d’Etat, Dol et Laurent.
Ces deux arrêts
ont révélé les 4 conditions d’applications de la circonstance
exceptionnelle :
- Il faut
identifier une situation grave, anormale, et imprévisible (Guerre, Emeutes.
- Ces
circonstances doivent mettre l’autorité administrative dans l’impossibilité de
respecter la légalité normale.
- Les
décisions prises par les autorités administratives, doivent être prises en
violation de la légalité normale.
- La durée
dans le temps, des mesures exceptionnelles, c'est-à-dire que les mesures prises
doivent être strictement limitées à la durée des circonstances exceptionnelles.
Cette condition est importante.
b)
Les
effets juridiques exceptionnels.
Il s’agit d’un bouleversement qui autorise la législation à
s’affranchir de certaines obligations. Possibilité d’enfreindre des
obligations. Par conséquent la révocation immédiate est justifiée en temps
exceptionnel. L’arrestation et l’internement d’office est justifiée en temps de
guerre.
Cela concerne surtout la police, restriction des mineurs de
13 ans de sortir après 23h.
2)
Le régime textuel des circonstances
exceptionnelles
a)
L’article
16
Le recours à l’article 16 est in justiciable, ne peut pas
être contesté devant le juge. En ce qui concerne les mesures prises utilisant
l’article 16 :
- Arrêt du
2 mars 1962 : Rubin De Servens, Le Conseil d’Etat a montré que lorsque si
le Président prend une décision qui en temps normal aurait relevé de la
compétence du législateur (34), il ne peut pas examiner la légalité de cet
acte. En revanche, si le Président prend un acte, qui en temps normal, relève
du pouvoir règlementaire (37), le Conseil d’Etat peut l’annuler.
b)
La
loi sur l’Etat de siège du 9 aout 1849
Toujours déclaré en décret du conseil des ministres, pour
une période limité à 12 jours, nécessite la réunion des deux assemblées
parlementaires pour prolonger. La conséquence de cette proclamation :
-
Restreindre les libertés individuelles
- Etendre
la compétence des tribunaux militaires.
c)
La
loi du 3 avril 1955, sur l’Etat d’urgence.
Mise en place pour faire face aux évènements de la guerre
d’Algérie. L’art 1 souligne qu’il s’agir de faire face à un péril imminent
résultant d’atteintes grave à l’ordre public.
Décret du 8 novembre 2005, applicable dès le
lendemain, mise en œuvre de l’Etat d’urgence sur le territoire métropolitain,
en donnant aux autorités administratives (Préfet), le droit de procéder à des
perquisitions de jour comme de nuit. Décret complété par celui du 1er
ministre, autorisant les préfets à interdire par arrêté préfectoral sur l’ensemble
du territoire métropolitain, la circulation des personnes et des véhicules dans
des lieux et à des heures déterminées, pour mettre en place des zones de
protection.
Ces décrets ont été contestés qui ont été rejetés par le
Conseil d’Etat.
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