Dans certains cas il n’est pas nécessaire de prouver un
dysfonctionnement fautif de l’administration. La victime doit seulement
démontrer un préjudice spécial (individualisable) et anormal (gravité
suffisante). Et un lien de causalité direct entre le fait dommageable et le
préjudice subit par la victime.
On a donc un régime de preuve allégé, puisqu’on ne recherche pas la
faute.
Principal fondement
de cette responsabilité : Soucis d’équité, lorsqu’il y a une rupture d’égalité
devant le service public, c'est-à-dire un préjudice spécial et anormal. Cette
rupture doit être réparée, indemnisé pour rétablir l’équilibre
La jurisprudence et le législateur ont reconnu des domaines
de la responsabilité sans faute. En pratique et surtout juridique, les domaines de la responsabilité sans
faute, se répartissent en deux critères :
- Le risque
qui se réalise et provoque un préjudice. La jurisprudence s’est inspirée de la
jurisprudence judiciaire.
- La
rupture directe de l’égalité devant les charges publiques. (activité
administrative au besoin de tous, si elle provoque un dommage spécial et
anormale vis-à-vis de la victime il y donc rupture d’égalité
Section 1 : La responsabilité sans faute pour risque
A) Les activités ou les méthodes dangereuses
Le JA a repris ce qui existait au niveau de la
responsabilité civile : la notion de trouble de voisinage entrainant un
risque réalisé sur une victime individualisé, d’un préjudice anormal.
L’arrêt de principe du 28 mars 1919 : Regnault des Roziers :
Il s’agissait d’un grand nombre d’explosifs entreposés dans un fort militaire,
mais situé à proximité d’habitations. A l’occasion d’une manutention il y a eu
une explosion importante : 30 victimes. Le CE a considéré que les
opérations effectuées dans des conditions sommaires, comportaient des risques
excédants les limites de ceux du voisinage.
En cas d’accident survenu
en dehors de tout fait de guerre, cela suffit à engager indépendamment de
toutes fautes, compte tenu de ces activités intrinsèquement dangereuses.
La jurisprudence a été étendue à d’autres méthodes
intrinsèquement dangereuses (qui font courir un risque) :
- Lecomte et Daramy, à propos d’une opération
de police, utilisation
d’armés à feu. Balle perdue. Le CE ne reconnait pas les matraques.
Autre extension : A propos de méthodes libérales
mais dangereuses qui font courir un risque à la population :
- Thouzellier, du 3 février 1956, à propos des méthodes
libérales de rééducation en milieu semi-ouvert (permission de sortie aux délinquants)
Cela fait courir des risques à la population. La victime
doit donc être indemnisée
sans rechercher de faute.
- CE 13 juillet 1967, dommage causée par un malade mental :
Indemnisation de la victime sur la base de la responsabilité sans faute.
- Idem pour les détenus en
permission de sortie. CE a reconnu
dans un arrêt Theys du 2 décembre 81, que les permissions de sortie des
détenus, entrainant un préjudice spécial et anormal, doit être indemnisé.
- Arrêt CE, Pelle, 5 décembre 1997 :
Responsabilité de l’Etat vis-à-vis d’une victime. Le CE a retenu la
jurisprudence de 56, à propos d’un mineur qui n’avait pas été condamnée, mais
confié à titre provisoire à une association privée : Voile et Nature.
Il a poignardé son moniteur de voile.
B) Les dommages subis par les collaborateurs occasionnels au
service public : des bénévoles.
Il s’agit d’accidents intervenus du fait d’une activité
administrative, vis-à-vis d’un collaborateur prêtant son concours à une
activité.
La notion de collaboration au SP est très importante :
il faut une véritable participation :
- Lorsqu’un médecin se porte au
secours d’enfant qui se noie, c’est une participation au SP.
Il y a eu une
évolution. Le CE a élargie la notion de collaboration :
- Au départ, la collaboration devait
être demandée par une autorité administrative : CE / Commune de Saint Priest La plaine. Il s’agissait d’une
explosion de feu d’artifice. A la
demande du Maire, deux personnes
avaient accepté de tirer le feu d’artifice. Risque encourue par ces personnes.
- La collaboration peut être spontanée, mais elle doit être justifiée,
il faut avoir des capacités pour venir au secours de quelqu’un :
-
Guinard, du 14 décembre 81 :
Non justifiée par le CE, car il venait d’être opéré de l’appendicite. Il a
voulu aider spontanément 6 infirmiers, à faire monter un malade obèse dans une
ambulance :
-
Commune de Batz sur Mer, 25 septembre
70 : Un médecin qui porte secours à un enfant qui se noie.
Justifié : 75 000 euros.
C) Les dommages causés au tiers pour travaux publics
La personne tierce est indépendante aux travaux
publics : Pont.
Quand c’est un usagé,
responsabilité pour faute, mais présomption de faute du SP. Le SP doit
démontrer l’entretien normal pour ne pas être condamné.
Quand une personne chute
en hiver sur le trottoir, à cause du verglas. Pour le CE, si la canalisation
était incorporée à la voie publique, la personne est un usagé.
La jurisprudence ne
fait pas de distinction lorsque l’ouvrage est particulièrement dangereux :
Virage sinueux. C’est un régime de responsabilité sans faute qui
s’applique :
- Arrêt CE du 18 décembre
1953 : Gain
- Confirmé
le 6 juillet 1973 : Dalleau : Route dangereuse.
La victime va montrer seulement démontrer le lien entre le fait
dommageable et le préjudice spécial et anormal. Pas à rechercher un
dysfonctionnement fautif.
Section 2 : La responsabilité sans faute pour
rupture directe d’égalité devant les charges publiques
Ce régime présente des particularités importantes :
- Il s’agit d’un régime subsidiaire,
c'est-à-dire dérogatoire, puisque le principe de la responsabilité
administrative est pour faute. Mais
d’ordre public :
Pour tout litige en
responsabilité, le juge doit pour toutes demandes d’indemnité réparatrice, doit rechercher si il y a ou non une
rupture directe d’égalité devant les charges publiques, Si il y a une gène
anormale et spéciale que n’ont pas supporté les autres.
Cela veut dire, que même si le juge n’en parle pas à son
jugement, il a examiné cette situation.
Pour la construction
du tram, cela a entrainé des troubles anormaux : Habitations avec
fissures, CA en baisse de 3%.
Une opération d’intérêt général ne doit pas lésé des
habitants ou commerçants.
Une indemnisation a été accordée, par un magistrat
indépendant.
- On retient 5
domaines d’application de cette responsabilité :
- Les
dommages permanents de travaux publics, lié à la présence ou au
fonctionnement d’un ouvrage public : Construction d’un tramway
- La
responsabilité du fait de la loi : Lésé une entreprise..
- La
responsabilité du fait des conventions internationales
- La
responsabilité du fait des règlements légaux : arrête municipal de
police
- La
responsabilité du fait des décisions individuelles légales
A)
Les dommages permanents de travaux publics
Cela peut être la
construction d’une autoroute, tramway, ou le fonctionnement d’un intérêt public (pas de mur antibruit).
Il y a une rupture d’égalité, lorsque cette construction
d’intérêt général lèse spécialement ou anormalement Mr X ou Mme Y. Il y aura
indemnisation.
Pour des raisons pratiques, on s’oriente vers la transaction
pour accélérer l’indemnisation et fixer une indemnité reconnaissant la
diminution du CA…
La transaction :
La victime renonce à tous recours.
B)
La responsabilité du fait des lois
Ce domaine d’application ne s’est mise en place qu’en 1938.
Il doit rester exceptionnel. 5 arrêts
retiennent la responsabilité de l’Etat :
- Arrêt du CE / Ass, du 14 janvier
1938 : SA des produits laitiers la Fleurette. Lorsque la loi
interdit la fabrication de crèmes alimentaires, non issue de lait, produit que
seule la société la fleurette fabriquait : Préjudice spécial et
anormal. Deux conditions cumulatives :
-
Un préjudice spécial (individualisable et anormal (grave).
-
Il faut que le législateur n’ai pas prévu dans la loi, les conséquences
dommageables de l’application de la loi.
- Arrêt du CE / S : Association
pour le développement de l’aquaculture en région centre et autres, du 30
juillet 2003 : Revirement d’une loi sur la protection des flamands
roses. Le CE souligne que lorsque ces animaux protégés provoquent des dommages
aux rizières, il y a une rupture d’égalité devant les charges publiques, du
fait de la loi (c’est parce qu’on protège ces espèces que les cultures sont
endommagées).
- Arrêt du 2 novembre 2005, Société
coopérative agricole, Ax’ion, Responsabilité sans faute du fait de la
loi sur les installations classés qui peuvent entrainer des conséquences
importantes.
Le CE renvoi à la Cours administrative d’appel pour chiffrer
le préjudice.
C)
La responsabilité du fait des conventions
internationales
Arrêt du CE/
Ass : 30 mars 1966 : Compagnie générale d’énergie radio
électrique : Qui retient seulement la solution de principe sans
l’appliquer au cas d’espèce. Il s’agissait de radios réquisitionnées pendant la
2ème guerre mondiale. Une convention internationale entre les Etats
reportait à plus tard l’indemnisation.
Il reconnait bien une responsabilité sans faute qui lèse les
compagnies. Mais il considère que le préjudice n’est pas spécial, car toutes
les radios sont concernées. Le CE refuse donc l’indemnisation pour
défaut de préjudice spécial (individualisable)
D)
La responsabilité du fait des règlements
légaux
Le CE l’a reconnut
dans un arrêt du 22 février 1963 : Commune de Gavarny : Un
arrêté municipal règlementant l’accès au cirque de Gavarny en réservant le
chemin, aux promeneurs à dos de mulet. Sauf que le marchand de souvenirs
n’avait plus de clients. Le marchand est donc lésé.
Confirmé, par le
CE du 13 mai 1987, Adebert : Le Maire prend un arrêté interdisant
la traversée de la commune aux véhicules de matières dangereuses (poids
lourds). Cette interdiction lèse spécialement et anormalement qui tenait un bar
restaurant routier.
E)
La responsabilité du fait des décisions
individuelles légales.
Cela s’est fait par
l’arrêt du 30 novembre 63 : Couitéas. Responsabilité sans faute de
l’Etat. Il s’agissait d’un refus de concours de la force publique, c'est-à-dire
refus du préfet pour assurer l’exécution d’une décision de justice :
refus d’expulsion.
Refus justifié, car expulser plus de 8000 personnes, donc
risque de trouble à l’ordre public.
Le préfet oppose un
intérêt supérieur : c'est-à-dire l’ordre public, qui empêche
l’exécution d’un droit conféré par une décision de justice.
L’Etat devra donc indemniser le propriétaire des locaux
lesé.
Lorsque le prêté envoi les
forces de police pour faire expulser, ce n’est plus un régime de responsabilité
sans faute, mais un régime de responsabilité pour faute, simple. La victime
devra montrer qu’il y a un préjudice.
A été étendu à
d’autres domaines d’applications :
- CE : 3 juin 1938 : Société Cartonnerie Saint
Charles : Refus de concours de la force publique pour faire
expulser des occupants d’usines (après un certain délai).
- CE du 11 mai 1984 : Port autonome
de Marseille. Refus de concours de la force publique pour lever le
blocus du Port occupé par des grévistes. Indemnisation.
Ce dernier domaine est
plus vaste, car il concerne des décisions individuelles légales.
A propos d’une décision
légale, mais qui a entrainé un préjudice spéciale et anormal :
- CA du 6
janvier 2005 : Le Département avait décidé de suspendre l’agrément
d’une assistante maternelle, car elle faisait l’objet d’une procédure pénale,
pour agression présumée. Mais pas de poursuite. La décision de suspension était
légale au moment des faits, mais elle a fait peser sur Mme M, une charge
anormale puisque s’appuyant sur des faits matériellement inexact, puisque sans
suite : 20 000 € d’indemnisation
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