mercredi 5 octobre 2016

Les modes de gestion du service public

Le plus souvent, la gestion des services publics est assurée par des personnes publiques. Il arrive aussi que cette gestion incombe à des personnes privées, investies d’une mission de service public, le plus souvent par voie contractuelle.


Section 1 : La gestion par une personne publique

Cette gestion publique se subdivise en deux orientations possibles. La gestion du service public peut être assurée directement, sans aucuns intermédiaires, par les collectivités publiques elles-mêmes. Mais les collectivités publiques peuvent également créer des établissements publics, c'est-à-dire des organismes publics spécifiques appelés à gérer un service public, et soumis en tant que tel à des contrôles de la part des collectivités publiques dont il relève. Dans cette seconde hypothèse, les collectivités publiques ne sont pas amenées à intervenir en première ligne. Elles gèrent par personnes publiques interposées.



A] Le procédé de la gestion directe

En l’espèce, les collectivités publiques prennent elles-mêmes en charge la gestion d’une activité de service public.
Exemple : Le service public de la justice est géré directement par l’Etat lui-même. En pareil cas, les services publics concernés ne constituent pas des entités juridiques distinctes de la collectivité de rattachement. En ce sens, de tels services publics sont placés sous l’autorité directe de la collectivité dont il relève.

/!\ Ce procédé de gestion est souvent qualifié de procédé de la régie (pour désigner de tels services gérés par des collectivités publiques). Il faut se méfier de l’utilisation du terme « régie ».
Exemple d’illustration des sens multiple du terme : La RATP, la régie autonome des transports parisien à un statut d’établissement public, ce n’est pas géré directement par des collectivités publiques.

La principale conséquence qui apparaît attaché à ce mode de gestion semble tenir dans l’absence complète d’autonomie de tels services publics vis-à-vis de la collectivité gestionnaire. Mais dans cette mesure là (et c’est souvent un facteur important lorsqu’il s’agit pour une collectivité de choisir le mode de gestion du service) la collectivité publique est amenée à endosser directement la responsabilité de la bonne marche du service public. Dans cette hypothèse là, la collectivité publique gestionnaire ne peut pas s’en prendre au gestionnaire


B] Le procédé de l’établissement public

Enjeux de ce choix de l’établissement public comme mode de gestion du service public. Autonomie avec à la clé, capacité d’initiative et dynamisme de gestion. Ce qui permet d’affirmer cela est le statut même d’établissement public.


a)      Le statut d’établissement public

L’établissement public peut se définir comme une personne morale de droit public spécialisée dans la gestion d’une activité de service public. De cette définition émerge deux éléments essentiels : L’autonomie et la spécialité


1] L’autonomie

En tant que personne morale, l’établissement public constitue une entité juridique propre qui est distincte  de la collectivité de rattachement. Ce faisant, un établissement public (exemple : une université) dispose d’organe de gestion propre, d’un budget et d’un patrimoine propre. Exemple : L’établissement public qu’est l’université Paris 1 à elle dispose d’organe de gestion propre, ce n’est pas l’Etat qui gère l’université, c’est un ensemble de Conseil avec un président élu qui est l’organe exécutif. Le budget de Paris 1 est un budget propre (pas le budget de l’Etat). è L’établissement public constitue une entité juridique propre.
Autonomie ≠ indépendance.
Tout établissement public bénéficie d’une autonomie, mais en même temps tout établissement public est soumis à des contrôles de la par de la collectivité de rattachement. S’il s’agit d’un établissement public national, c’est l’Etat qui exerce un contrôle. [Exemple : Paris 1 est soumis à un contrôle de l’Etat par l’intermédiaire du recteur de l’académie de Paris]. Ce contrôle est qualifié de contrôle de tutelle, par opposition au contrôle de type hiérarchique. Le contrôle de tutelle est un contrôle moins pesant que le contrôle hiérarchique. Le contrôle hiérarchique est un contrôle opéré par un supérieur sur les activités subordonnées. Rien de tel ici ! L’établissement public n’est pas dans un lien de hiérarchie vis-à-vis de sa collectivité de rattachement, le lien s’établie entre deux personnes juridiques différentes, il convient donc de préserver cela. Par conséquent dans le cadre d’un contrôle de tutelle, l’instance de contrôle dispose de pouvoir moindre que dans un contrôle hiérarchique. Dans le cadre d’un contrôle de tutelle, il n’y a pas de pouvoir d’injonction (à pas le droit de donner des ordres). 


2] La spécialité

Par spécialité, on entend que les établissements publics ont un champ de compétences délimitées par les textes qui le créent. L’idée est alors qu’un établissement public ne peut pas s’évader hors de sa spécialité sauf à verser dans l’irrégularité. En ce sens, la spécialité apparaît comme une contre partie de l’autonomie conférée aux établissements publics. Les établissements publics sont autonomes mais seulement à l’intérieur d’un domaine d’action spécifique.

Dans la pratique, on observe depuis des décennies, que la formule de l’établissement public a été victime de son succès dans la mesure où les collectivités publiques ont eu très largement recours à ce procédé. Cette diffusion de la formule de l’établissement public a engendré ce que certain ont appelé « la crise de l’établissement public ».


b)      « La crise de l’établissement public »

Cette crise affecte les deux traits caractéristiques de l’établissement public, l’autonomie comme la spécialité. Tout ce passe comme si à ces deux égards une gamme variée d’établissements publics s’était constituée. La multiplication des sous ensembles finissant par faire éclater ensemble.
En pratique, on observe la coexistence d’établissements publics dont la liberté d’action parait extrêmement faible ; et d’autre qui, dans les faits, sont dans une situation qui n’est pas éloignée d’une véritable indépendance.
Comparons ce que peut être en pratique l’autonomie d’un professeur et celle de la SNCF. Le fait même de pointer ces deux exemples là nous permet de prendre conscience de l’éclatement de cette formule juridique. Qu’est-ce qu’il y a de commun  dans les faits entre un professeur et la SNCF ? Pratiquement rien ! Mais c’est le même mode de gestion qui est à l’œuvre dans les deux cas. L’autonomie du professeur est faible. Le chef d’établissement nommé par l’Etat, les programmes d’enseignements sont fixés par l’Etat, les enseignants sont nommés et rémunérés par l’Etat. En revanche avec la SNCF, le dialogue entre Etat et SNCF ne se fait pas au bénéfice de l’Etat. Au regard de l’autonomie, on a de vrais et de « faux » établissements publics.

En ce qui concerne la spécialité, il y a là encore éclatement. Certains établissements publics ont un champ de compétence très étroitement tracée par les textes créateurs. La spécialité d’un professeur est de délivrer des activités d’enseignements et c’est tout. En revanche, comment est définie la spécialité de la SNCF ? Loi du 30 Décembre 1982 à La SNCF peut exercer toutes activités se rattachant directement ou indirectement à sa mission principale. Qu’est-ce qu’une activité se rattachant indirectement aux chemins de fer ? à Difficile à définir. è Développement d’activité de transport terrestre. La SNCF est en situation de se faire concurrence à elle-même. Est-ce irrégulier ? Non car la définition de la spécialité de la SNCF est très souple par le texte statutaire lui-même.

Le nombre d’établissements publics est tellement important que cela ne peut que nuire à cette catégorie de services publics. La seule chose commune à tous les établissements publics est un même moule juridique. Qu’est-ce qui a conduit à ce développement excessif de la formule de l’établissement public ? Sans doute la pauvreté de notre droit français en matière de forme juridique. Si l’Etat entend assurer la gestion d’un service public par une personne public, quel est le choix ? Ou bien la gestion est directe, ou bien c’est un établissement public.
La facilité de création d’un établissement public a elle aussi conduit à cette « crise  de l’établissement public ».


C] Les conditions de création de l’établissement public

Il est facile de créer un établissement public. C’est aussi facile pour l’Etat de créer un établissement public national que pour les collectivités territoriales de créer un établissement public local. Pour ce qui est des établissements publics nationaux, l’intervention du législateur n’est que rarement nécessaire. Ce qui permet d’affirmer cela est l’article 34 de la Constitution. Cet article pose que c’est la loi qui fixe les règles concernant la création de catégorie d’établissements publics. A partir de là, dès lors qu’un nouvel établissement public peut s’intégrer dans une catégorie existante un texte réglementaire suffit pour créer cet établissement. Si  l’Etat veut créer un nouveau lycée, faut-il une loi ? Non, un simple texte réglementaire suffit. A contrario, une loi n’est requise que lorsque le nouvel établissement public à créer est sans équivalent, et ne peut donc être rangée dans aucunes catégories existantes.
Pour ce qui est des établissements publics locaux, c’est aux assemblées locales qu’il revient de prendre l’initiative de la création. Cela signifie que si une commune veut créer un nouvel établissement public communal, une délibération du conseil municipale suffira pour ce faire.

Au plan formel, la physionomie de l’établissement public peut être dessiné de façon clair et nette. Dans la pratique, la situation est brouillée, et l’établissement public est victime de son succès. Trop d’établissements publics = écartèlement du moule juridique.

S’agissant du régime juridique de l’établissement public, on en a encore rien dit… !


D] Le régime juridique de l’établissement public

On pourrait dire que l’établissement public est une personne morale de droit public, alors c’est le droit public qui s’applique.

En elle-même, la qualité d’établissement public n’emporte pas de conséquence décisive quant au régime juridique applicable. Certes, pour ce qui est de leur organisation les établissements publics en tant que personnes publiques relèvent des règles du droit public. En revanche, la situation est plus délicate pour ce qui est des activités d’un établissement public. Sur ce terrain là, il convient de se référer à la qualification juridique de l’établissement public. Par qualification on entend le caractère administratif ou bien industriel et commercial d’un établissement public. Le plus souvent, les textes créateurs précisent cette qualification juridique. Il arrive aussi que ces textes demeurent muets. Pour faire face à pareil silence, la jurisprudence a mis en place une méthode d’identification. Cette méthode d’identification est identique à celle utilisée pour distinguer les services publics administratifs des services publics industriels et commerciaux. Cela signifie qu’un établissement public industriel et commercial est un établissement qui exerce des activités de production, de vente etc. des activités similaires à celles d’entreprises privées. Un EPIC doit fonctionner comme une entreprise équivalente du secteur privé (même procédé juridique, financier etc.). Un EPIC doit avoir des ressources qui proviennent pour une large part des rémunérations versées par les usagers. A ce compte là, la SNCF ou la RATP sont-elles des établissements administratifs ou bien des établissements industriels et commerciaux ? Elles sont des établissements industriels et commerciaux ! Avant la création de la RATP, il existait des compagnies privées de transport. Cette qualification juridique influe de façon notable sur le régime juridique applicable aux activités de l’établissement. Les établissements publics administratifs ont pour vocation de gérer une activité de service public administratif, alors que les établissements publics industriels et commerciaux ont pour vocation de gérer une activité de service public industriel et commercial.
Alors, à ce compte là, les établissements publics administratifs relèvent du droit public aussi bien pour leur organisation que pour leurs activités. [Exemple : un lycée relève du droit public aussi bien pour son organisation que pour ce qui est de ses activités, de même pour un hôpital].  En revanche, un établissement public industriel et commercial relève, certes du droit public pour son organisation, mais du droit privé pour ce qui est de ses activités.  Un établissement public industriel et commercial est une personne morale de droit public, mais dont les activités relèvent pour l’essentiel des règles du droit privé. Exemple : On est usager de la SNCF, mon train a eu 20min de retard et on a raté 20min du cours de droit administratif. Si on demande les réparations du préjudice subit, on ira devant le juge judiciaire, parce que les relations entre la SNCF et moi-même sont des relations de droit privé.


Cela dit, il faut être prudent quant à l’usage de ce réflexe dont la fiabilité n’est pas absolue. Il existe des faux amis L Les faux amis ici sont les établissements publics à double visages. On entend par là des établissements publics qui gèrent à la fois des activités de services publics administratifs et des activités de services publics industriels et commerciales. Exemple : les chambres de commerce et d’industrie. Ce sont des établissements publics qui ont  à la fois des activités administratives et des activités industrielles et commerciales. Ces chambres de commerce et d’industrie sont qualifiées de service public administratif. Si on s’en tient à la qualification du service, on a une vision fausse du régime juridique applicable. Dans ce cas là, pour déterminer le régime juridique applicable aux activités, il faut procéder au cas par cas.
Les établissements publics à visage inversé à On entend par là un établissement public qui exerce des activités dont la nature juridique est en contradiction avec sa qualification juridique. Ce sera donc un établissement public, qualifié d’industriel et commercial qui gérera des activités de nature administratives. Exemple : Etablissement public aujourd’hui disparu a fait l’objet d’un arrêt célèbre en 1978 à Le FORMA. Ce FORMA avait été qualifié d’établissement public industriel et commercial. Et le tribunal du conflit vient à dire que les activités de cet établissement sont de nature administrative. Pour déterminer le régime applicable, il convient de faire abstraction de la qualification juridique pour privilégier la nature effective des activités menées, et donc là ce sont les règles du droit public qui s’appliquent.

Ces situations sont des situations exceptionnelles. En règle générale, lorsqu’on s’interroge sur le régime juridique d’un établissement public on est fondé à se référer à sa qualification juridique. Donc en règle général un établissement public administratif (un hôpital) est un organisme qui relève du droit public pour son organisation et pour ses activités ; alors qu’un établissement public industriel et commercial (SNCF ou RATP) relève du droit public pour son organisation mais du droit privé pour ses activités.


E] Etablissement public et entreprise publique

Il y a là deux notions qui sont loin d’être assimilables, mais qui se recoupent pour partie. Les entreprises publiques ne s’incarnent pas dans un moule juridique identique. Certaines entreprises publiques ont la forme de la société. [Exemple : EDF était jusqu’à peu un établissement public industriel et commercial, et c’est aujourd’hui une société dont le capital social appartient majoritairement à l’Etat. En ce sens, cette société est une entreprise publique.] D’autre entreprise publique ont la forme d’établissement public industriel et commercial (comme la SNCF et la RATP). Tous les établissements publics industriels et commerciaux ne sont pas des entreprises publiques, mais certains de ces établissements industriels et commerciaux sont des entreprises publiques.

Si la collectivité publique crée un service public en choisissant le mode de gestion directe. à Emprise directe de la collectivité publique sur le service public. Cette collectivité publique doit assurer la responsabilité de la gestion
Si c’est le mode de l’établissement public qui est choisi, la collectivité public ne s’avance plus en première ligne. La collectivité publique s’en remet à un organisme spécifique. C’est ce dernier qui sera en charge de la gestion quotidienne du service, et c’est lui qui sera en première ligne et qui assumera la responsabilité de la gestion. Il y aura dissociation entre la collectivité publique et le rattachement, les gestionnaires du service auront une capacité d’initiative. La collectivité pourra contrôler et orienter le service mais ne pourra pas le gérer quotidiennement.
La gestion privée du service public consiste à confier la gestion du service public à un opérateur privé.


Section 2 : La gestion du service public par une personne privée

Le plus souvent, lorsque les collectivités publiques entendent confier la gestion d’un service public à un opérateur privé, elles le font par la voix du contrat. Mais il arrive aussi que le mode de l’acte unilatéral soit utilisé pour ce faire.




A] La dévolution contractuelle du service public

Les différents types de contrat par lesquels les différentes collectivités publiques peuvent confier la gestion d’un service public à une personne privée, sont regroupés au sein d’une catégorie juridique, dont la consécration est récente. à Convention de délégation de service public.
Il y a plusieurs types de contrat, plus ou moins ancien : les contrats de concession, d’autres apparaissent comme des variantes : les contrats de régie intéressée, et les contrats de l’affermage.


a)      La notion de délégation de service public

D’abord, il faut définir quels sont les critères qui permettent d’identifier la délégation de service public. Ensuite, il faut définir quels sont les enjeux attachés à la qualification de délégation de service public, et quel est son régime juridique.


1] Les critères de définition de la délégation de service public

Dans un premier temps, c’est la jurisprudence qui a exploré le terrain, jusqu'à ce que le législateur vienne consacrer l’œuvre de la jurisprudence. La loi de référence en la matière est une loi du 11 décembre 2001. Elle n’apporte rien de nouveau au regard de la démarche développée par la jurisprudence. Définition fournie par la loi : Une délégation de service public est un contrat, par lequel une personne publique confit la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé dont la rémunération est liée substantiellement aux résultats de l’exploitation du service.

Il y a quatre éléments qui permettent de justifier la définition :

~ Les activités confiées aux délégataires doivent avoir le caractère de service public. En pratique, il s’agit de la distribution de l’eau, le ramassage et le traitement des ordures ménagères, les transports scolaire, le chauffage urbain etc.

~ Le service public confié doit être effectivement délégable. C'est-à-dire qu’il ne figure pas au nombre de ceux qui, par leur nature, ou par la volonté du législateur, ne peuvent être assurer que par une collectivité publique. Exemple : Les cantines scolaires à la surveillance des enfants ne peut être déléguée (même si la confection des repas peut être déléguée à un autre organisme).

~ Le délégataire doit être réellement investi de la gestion d’un service public. Il ne doit pas se limiter à apporter une simple collaboration au service public.

~ La rémunération du délégataire doit être liée, pour une part substantielle aux résultats de l’exploitation et à ses risques. Au vu de la jurisprudence, c’est un seuil de 30% qui est retenu. Il y a rémunération substantiellement liée au résultat d’exploitation, si à hauteur de 30% au moins les ressources du délégataire proviennent de l’exploitation du service. (si c’est moins de 30%, il ne s’agira pas d’une délégation de service public).

Quels sont les enjeux attachés à la délégation du service public ?


2] Le régime de la délégation

Il y a un double enjeu attaché à la notion de délégation. Il y a des enjeux pour ce qui est du choix du délégataires (les collectivités publiques ne peuvent pas procéder n’importe comment), et deuxième enjeu s’agissant de la durée des délégations.

  • Le choix du délégataire : Le problème sur ce terrain est de subordonner la passation des contrats de délégation à une certaine mise en concurrence, et à des exigences de transparences. Au plan procédural, les collectivités publiques doivent donc commencer par faire connaître leur projet de déléguer un service public afin que les entreprises concernées soient en mesure de faire connaître leur intérêt à l’attribution de l’obligation. Les collectivités publiques doivent procéder par appel à candidature, c'est-à-dire par voix d’annonce qui sont publiées dans la presse spécialisée ou dans la presse locale. Au lendemain de la publication de ces avis, les opérateurs intéressés sont amenés à faire acte de candidature. C’est à la collectivité publique qu’il revient de choisir le délégataire. A ce stade, les collectivités publiques disposent d’une très large marge d’appréciation. Autrement dit, les collectivités publiques disposent d’une large compétence discrétionnaire. Elles ont le loisir de choisir le délégataire en fonction des qualités propres de celui-ci. Elles n’ont pas d’obligation faite aux collectivités publiques de choisir l’offre qui serait le plus basse, ou celle qui ferait apparaître le meilleur rapport qualité prix. La seule prohibition véritable est celle de cultiver le secret. Il faut un minimum de transparence en la matière, qui est assuré par l’exigence initiale de publicité.

  • La durée des délégations : Si les conventions de délégations pouvaient être conclues pour une durée extrêmement longue, il y aurait là des pratiques nuisibles à la concurrence. Il y aurait des sortes de fiefs qui seraient acquis par les délégataires de service public. Les limites ont néanmoins un caractère très souple. Le principe est que la durée des délégations est limitée en fonction des prestations à réaliser et en particulier lorsque les équipements sont à la charge du délégataire en fonction de leur durée d’amortissement. Là encore, il y a une large marge d’appréciation au bénéfice des collectivités publiques. Sans doute y a-t-il quelques domaines d’activité dans lesquels il y a un degré supplémentaire de précision. Cette précision supplémentaire est apportée par une loi du 2 Février 1995. Cette loi dispose que dans le domaine de l’eau potable, de l’assainissement, et des ordures ménagères, les délégations ne peuvent pas avoir une durée supérieure à 20 ans. Même cette loi-là prévoit des exceptions qui ouvrent la porte à des reconductions possibles, lorsque certaines conditions se trouvent réunies. Les textes de référence en la matière date pour les premiers du début des années 1990. Avant cela, il n’y avait rien du tout, les collectivités publiques pouvaient procéder en toute liberté.


b)      Les formes de délégation de service public

La délégation de service public peut revêtir trois formes. La formule de base est la concession. A coté de la concession, il y a deux autres techniques qui font figure de variantes. Ce sont d’une part l’affermage, et d’autre part la régie intéressée.




1] La concession de service public

La concession de service public est une formule très ancienne, qui est déjà utilisée abondamment au XIXe siècle. En pratique, c’est par le biais de la concession que se développe la distribution de l’énergie à la fin du XIXe siècle. Cette formule est toujours de mise aujourd’hui. Mais cette longévité n’a pu s’affirmer que moyennant un certain nombre de transformations qui ont affecté la substance de la concession.
La concession naît d’un contrat par lequel une collectivité publique, dite concédante, confit la gestion d’un service public à une personne privée, dit concessionnaire, qui exploite le service à ses risques et périls, en étant habilité à percevoir des redevances versées par les usagers. Le concessionnaire doit assumer la gestion du service public qui lui ait confié, en particulier au plan financier. Il y a là, une parfaite illustration de l’un des éléments clé de la convention de délégation de service public, en ceci que si le concessionnaire réalise des bénéfices, tant mieux pour lui ; mais s’il y a des déficit, il doit y faire face par ses propres moyens. C’est cet élément qui est au cœur même de la concession de service public.
En  pratique, ce n’est pas toujours effectivement cela. On touche ici un élément majeur de l’évolution qui a modifié ce procédé de gestion. Aujourd’hui, il est fréquent que les collectivités publiques s’engagent à consentir au bénéfice du concessionnaire des subventions d’équilibre, en cas de gestion déficitaire. De telles pratiques dénaturent singulièrement la concession.  S’il y a pareil engagement pris par la collectivité publique, c’est la négation de la gestion aux risques et périls du gestionnaire. L’image de la concession est aujourd’hui très souvent brouillée.
Certains observateurs, prenant appuie sur de telle situation, ont été amenés à écrire qu’a ce compte là le procéder de la concession constitue une sorte de « faux capitalisme » (Guy Brebant). Cet auteur énonce que la situation du gestionnaire est vraiment très confortable dans cette situation. Mais ces subventions d’équilibre visent d’autres objectifs que la seule satisfaction de l’intérêt propre du concessionnaire. Exemple : la ville de Marseille conclut une concession de service public pour la gestion des autobus communaux. Si la société de transport fait acte de candidature et signe le contrat de concession, c’est dans la perspective de réaliser des bénéfices. Mais si les bénéfices ne sont pas là, parce que les marseillais ne prennent pas les bus. Si la gestion est lourdement déficitaire, si la ville de Marseille demeure passive, la société déposera le bilan, et ce dépôt de bilan sera suivi d’une interruption du trafic de bus. C’est alors que sera gravement altérée la continuité du service public (à principe cardinal du statut du service public. S’il n’y a plus de bus, les marseillais seront mécontents et protesteront contre l’inertie de la ville. De ce fait, les subventions d’équilibre brouille la concession de service publique ; mais en pratique il y a des impératifs qui s’imposent aux parties du contrat. Ces impératifs peuvent s’imposer aux collectivités publiques.
Au vu de cela, on prend conscience que la concession de service public est une modalité très souple de gestion. Mais c’est moyennant cette souplesse que la concession bénéficie de la longévité qui est la sienne. Il y a d’autres évolutions qui ont modifié la concession.
En effet, il n’est plus systématiquement vrai de poser aujourd’hui que la rémunération d’un concessionnaire est assurée par des redevances versées par les usagers. Ce n’est plus systématiquement vrai d’affirmer cela. Et pourtant, c’était un élément clé de la définition de la concession. Dans un arrêt du Conseil d’Etat du 16 Avril 1986, compagnie luxembourgeoise de télédiffusion, ce qui était mis en cause était le statut de la 5e chaîne de télévision. En 1986, cette 5e chaîne de télévision se trouve privatisée. Le régime juridique adoptée est celui de la concession, un contrat de concession est passé par l’Etat avec un groupe d’opérateur privé, à la tête duquel il y a notamment Silvio Berlusconi. Le conseil d’Etat vient à être saisit suite à un litige. La question est de savoir si le contrat en question constitue bien une concession de service public. Ce qui fait problème est la rémunération du concessionnaire. La 5e chaîne, dans ce statut de l’époque, n’est pas conçu comme une chaîne à payage. Les concessionnaires se rémunèrent en diffusant des messages publicitaires. Compte tenu de cette modalité de rémunération du concessionnaire, on pourrait dire que ce n’est donc pas un contrat de concession, et pourtant dans cet arrêt le Conseil d’Etat accepte de voir un contrat de concession de service public. Ce qui est privilégié par le conseil d’Etat est que la rémunération du concessionnaire est substantiellement liée au résultat de l’exploitation. S’il y a beaucoup de téléspectateurs, le prix payer par les publicitaire sera élevé, et inversement.

C’est la souplesse du contrat de concession qui a permis la pérennité de cette forme de délégation.


2] La formule de l’affermage

L’affermage met en relation une collectivité publique, dite affermante, et un cocontractant, qualifié de fermier. Le fermier, comme le concessionnaire, se voit confier, par contrat, l’exploitation d’un service public, dont il tire sa rémunération. A la différence du concessionnaire, le fermier n’est pas en charge de la réalisation des équipements nécessaires à l’exploitation du service. Ces équipements sont remis au fermier par la collectivité publique, moyennant quoi, il revient au fermier de verser une redevance à la collectivité publique.
Exemple : Distribution de l’eau à la commune X a le choix entre la concession et l’affermage. Si c’est la concession qui est choisie, à ce moment là, c’est le concessionnaire qui devra construire les canalisations, et qui devra assurer leur entretien. Si c’est le procédé de l’affermage, à ce moment là, c’est la commune qui sera en charge de la réalisation des canalisations et qui sera responsables de leur entretien. Mais dans les deux cas, qu’il s’agisse de concession ou d’affermage, le gestionnaire du service tirera sa rémunération de redevance que paieront les usagers du service. On est ici effectivement fondé que l’affermage est une variante de la concession.


3] Le procédé de la régie intéressée

C’est un procédé qui conduit une collectivité publique à confier, par contrat, la gestion d’un service public à une personne privée, qualifiée de régisseur. Ce régisseur tir sa rémunération non pas des bénéfices éventuels dégagés par sa gestion (puisque ceux-ci sont perçus par la collectivité publique). Il tire sa rémunération d’une redevance qui lui est versée par la collectivité publique. Si on se limite à cela, on est fondé à ce dire, il n’y a pas en la matière de convention de délégation de service public, parce qu’il manque un élément clé (la rémunération du régisseur n’est pas substantiellement liée au résultat de l’exploitation). La rémunération du régisseur est certes assurer par une redevance allouée par la collectivité publique, mais cette redevance est fonction de la qualité de la gestion. Si la gestion est satisfaisante, les usagers auront tendance à utiliser le service public et inversement ; et dans cette mesure là, la régie peut être considéré comme une forme de la délégation de service public (et la jurisprudence l’admet).

Il peut arriver que des considérations d’ordre idéologiques soient ici présentes (à collectivité qui gère directement les services publics) Mais le plus souvent ce sont des considérations gestionnaires.


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