mercredi 5 octobre 2016

Les juridictions administratives

Elles ont un statut constitutionnel, le législateur ne peut pas porter atteinte à l’ordre juridictionnel administratif.

Section 1 : La compétence de la juridiction administrative

1)      Les origines de la séparation administrative et judiciaire

On peut remonter cela aux principes révolutionnaires, mais ces derniers n’ont pas apporté de révolutions, se sont inspiré de l’ancien régime, et de la méfiance du Roi vis-à-vis du  parlement ordinaire.

Par conséquent, il faut remonter cette séparation à l’ancien régime, car on remarque que le contentieux administratif était assuré soit par les représentants du Roi, soit par le Roi lui-même. Il y avait donc une confusion administration-juridiction. Les parlements ordinaires ont revendiqué leur compétence pour connaitre les affaires de l’Etat, y compris en matière financière.

Edit de Saint Germain, du 21 février 1641 :
            - Condamne l’interférence du parlement en matière administrative, c'est-à-dire interdit aux parlementaires de connaitre les litiges administratifs.

Edit de Fontainebleau, 1661 :
            - Interdiction au Parlement, de connaitre l’ensemble des affaires concernant l’Etat.

2)      Le principe révolutionnaire de cette séparation, et ses conséquences

L’origine des juridictions administratives, et de cette séparation vient de la méfiance du Roi. Les révolutionnaires vont reprendre cette méfiance royale, en réaffirmant les deux Edits.

La loi révolutionnaire d’organisation judiciaire des 16 et 24 aout 1790. Article 13 : Les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives.

Décret du 16 fructidor An 3 : « défenses itératives (répétée), sont faites aux tribunaux de connaitre des actes administratifs

Par conséquent, une fois ce principe réaffirmé, il restait à l’administration à se doter d’un juge en tant que tel. Cela va mettre plus de temps, puisqu’il faudra attendre 1799 pour que Napoléon créé le Conseil d’Etat :
            - Préparer les projets de loi et de règlements.
            - Résoudre les litiges en matières administratives.

Dans chaque département, le Conseil des préfectures étant les ancêtres des tribunaux administratifs.

Cependant, ils ne correspondaient pas à un véritable juge indépendant de l’administration, et il faudra attendre la réforme la plus importante : 24 mai 1872, pour  que l’on passe d’un système de justice retenu à un système de justice délégué :
- Avant cette loi, le CE ne rendait que des avis en matière de contentieuse, ne tranchait pas les litiges, mais seulement soumis à l’exécutif qui devait approuver ou non l’avis.
- Avec cette loi, le CE va rendre des actes juridictionnels, lui permettant de trancher lui-même le litige, sans s’en remettre à l’exécutif.

CE 13 décembre 1889, Cadot, ou le CE affirme que le refus du Maire et du Conseil Municipal de faire droit à la réclamation de Mr Cadot, est né un litige, dont il appartient au CE d’annuler le refus.

Cette loi marque la mise en place des juridictions administratives.

Ø  Conséquences :

Cela va provoquer un engorgement du CE. Dans les années 1950, plus de 25 000 dossiers en instance devant le CE.
Donc mise en place de réformes :
            - 1953 : 30 septembre et 28 novembre :
- Qui transforment les conseils de préfectures, en tribunaux administratifs.
- Les tribunaux administratifs reçoivent une compétence élargie en contentieux, c'est-à-dire qu’ils deviennent les juges de droit commun en matière administrative. Cela veut dire que dès l’instant où il n’ya  pas un texte qui attribue la compétence à une autre juridiction, c’est le tribunal administration qu’il faut saisir.

Cependant, à partir dès 1980, le CE a encore plus de 100 000 affaires en instance, il faut donc à nouveau désengorger le CE. Ce qui va se faire en créant de nouvelles juridictions administratives :
            - Les Cours administratives d’appel. Loi du 31 décembre 1987, qui va s’appliquer qu’en 1989, distinctes en 5 cours, qui vont récupérer un grand nombre de contentieux d’appels, soumis à l’origine au CE.
Entre 1989 et 1995, l’essentiel du contentieux de l’excès de pouvoir en appel, est transféré à ces Cours.

Cette réforme n’a finalement pas suffit, il y a toujours un afflux de contentieux administratif pour plusieurs raisons :
            - Les administrés sont de plus en plus procéduriers.
            - Les textes sont trop vite faits et mal faits

Pour améliorer le fonctionnement des juridictions administratives, certes le législateur a voté la loi du 9 septembre 2002, renforçant les moyens de la justice. En moyenne le contentieux progresse entre 5 et 7 % par an. Mais le législateur a trouver la parade, en mettant en place pour de plus en plus de litiges, le juge unique : le juge peut se prononcer seul sur un litige, par voie d’ordonnance pour accélérer le cours de la justice.
- Cela concerne notamment le contentieux fiscal pour les litiges mineurs.
(taxe d’habitation, foncière).
            - Toutes les demandes d’indemnités inférieures à 8000 euros.
            - Pas d’appel possible, seulement une cassation éventuelle.

3)      Le statut constitutionnel de la juridiction administrative

Malgré le silence de la Constitution, qui ne parle que du juge judiciaire, le juge constitutionnel a consacré l’existence même de la juridiction administrative.

Deux décisions :
            - 22 juillet 1980, qui pose le principe d’indépendance de la juridiction administrative :
                        - Seul le législateur est compétent pour créer ou pour supprimer une juridiction administrative, mais il ne peut pas en revanche supprimer l’ordre juridictionnel administratif, sans porter atteinte à son indépendance.
                        - Le CC montre bien que ce principe d’indépendance implique que chacun des deux ordres juridictionnels, judiciaires et administratifs, reçoit des compétences propres du législateur.
                       
            - Décision du 23 janvier 1987, Loi transférant au juge judiciaire, de l’ensemble du contentieux concernant les décisions du Conseil de la Concurrence. 

- Le CC autorise le législateur à transférer des compétences d’un bloc à un autre, à condition que cela n’aboutisse pas à vider l’existence même de la juridiction administrative et donc son indépendance.

Indépendance des magistrats, mais rien de prévu pour le CE, car l’indépendance entraine aussi l’inamovibilité. Donc compliqué, puisqu’il n’y en a qu’une…..

Section 2 : L’organisation de l’ordre juridictionnel administratif


I)                   Les juridictions administratives générales :

Il y a d’abord les tribunaux administratifs.
Ensuite les Cours administratives d’appel.
Enfin le Conseil d’Etat, qui a une triple compétence en matière de contentieux :
            - En 1er et dernier ressort.
            - Il est encore juge d’appel.
            - Il est juge de cassation.

1)      Les tribunaux administratifs

Ils sont issus des conseils des préfectures départementaux. A partir de 1926, interdépartementaux.
Puis décret loi de 1953, devenu tribunaux administratifs, avec compétence élargie.

38 tribunaux administratifs, dont 9 outre-mer.

Ils ont une compétence de droit commun :
            - Acte administratif des personnes morales de droit public (collectivité territoriales, hôpitaux, universités).
            - Acte administratif pour les personnes morales de droit privée.

Lorsqu’il y a une décision administrative prise par une autorité administrative, la compétence revient en principe au juge administratif, sauf lorsqu’il s’agit d’actes d’Etat civils, de personnes, et par conséquent il s’agit du juge civil (décès, expropriation).

Le juge administratif est aussi le juge de l’impôt car il connait les principaux impôts d’Etat et locaux : TVA, impôt sur le revenu, sur les sociétés.

En matière de responsabilité administrative, il est aussi compétent, comme les dommages, d’un dysfonctionnement fautif et ayant entrainé un préjudice.
Enfin, il connait également une partie du contentieux électoral, en ce qui concerne la régularité des élections municipales, ou cantonales.

Le juge administratif cherche si il est bien compétent, et territorialement aussi, et si il ne l’est pas, il doit chercher le juge compétent.

Le juge administratif est compétent en ce qui concerne les actes de police administrative, c'est-à-dire la règlementation mise en place au niveau territorial (stationnement, circulation, affichage). Il va de même pour les marchés de travaux publics.

2)      Les Cours administratives d’appel

Elles sont chargées d’examiner les recours en appel contre les jugements des tribunaux administratifs. Il s’agit de jeunes juridictions, puisqu’elles n’ont été mise en place qu’en 1987, entrée en vigueur en 1989, régies entièrement par le code de la justice administrative de 2001.

Il y a aujourd’hui 8 Cours administratives d’appel :
            - 5 à l’origine :
- Bordeaux
                        - Lyon
                        - Nancy
                        - Nantes
                        - Paris
            - 3 nouvelles :
                        - Marseille
                        - Douai
                        - Versailles.

L’organisation interne est calquée sur celle des tribunaux administratifs :
            - Chaque Cours fonctionne en chambres.





La compétence de ces Cours s’est étendue entre 1989 et 1995 :
            - Transfert des compétences du CE vers ces Cours pour désencombrer leurs travaux.
            - Pour réduire le délai de jugement, préoccupation constante, ont été mis en place des contrats d’objectifs, concernant la période 2008-2012, et ce contrat d’objectifs permet d’engager des moyens en personnels (greffiers), et aussi en locaux. En contrepartie, réduction des délais de jugement.



De nombreuses compétences :
            - Pour statuer sur les appels formés contre les jugements d’actes administratifs, en matière d’urbanisme, d’expropriation, en matière fiscale, acte de la fonction publique (règlementaire ou individuel).

3)      Le Conseil d’Etat

Le CE, mis en place en 1799.
Jusqu’en 2001, le CE était régi à part, par l’ordonnance du 31 juillet 1945. Et un décret d’organisation du 30 juillet 1963, modifié par un décret du 6 mars 2008.

Tout le fonctionnement est régi par le code des juridictions administratives. EN pratique c’est le président d’assemblée du contentieux qui préside le CE, mais souvent le vice président.

Le CE a deux fonctions :
            - Conseiller le Gouvernement
            - Mission contentieuse résiduelle, qui a un rôle d’unification de la jurisprudence administrative.

Réforme du 6 mars 2008, entrée au 1er septembre 2008. 3 points importants :
            - Réorganisation de la section du contentieux et de l’assemblée du contentieux.
            - Réorganisation des formes administratives consultatives (avis donné par le CE sur les projets de loi et de décret).
            - Séparation des deux formations administratives qui sont désormais clairement séparées.





Eléments de la reformes :

Ø  Section du contentieux :

Elle est réduite en nombres, ramenée de 17 à 15 membres, c'est-à-dire qu’elle a perdu 2 membres qui appartenait aux formations administratives :
            - 1 Président
            - 3 Présidents adjoints
            - 10 Président des sous sections, d’instruction et de jugement
            - 1 rapporteur.

Désormais, ses membres sont en nombres inférieur par rapport à l’assemblée du contentieux.

Lorsque les arrêts du CE sont rendus en section du contentieux, cela veut dire que le CE doit trouver une solution d’ordre technique :
            - Arrêt Lagrange, CE met en exergue l’erreur manifeste d’appréciation, encadrer le pouvoir discrétionnaire de l’administration.


Ø  L’Assemblée du contentieux :

Le nombre de Conseillers d’Etats, passe de 12 à 17, et qui révèle un poids supérieur à la section précédente.
Elle ne siège plus en nombre paires, ce qui entrainait la voix prépondérante du Présidente…mais en nombre impaires…

Elle statue pour une solution nouvelle :
            - Loi Nicolo…que devront suivre les autres juridictions. Ce sont donc des arrêts de principes.

Composition :
            - 1 Vice président du CE
- 1 Président de la section du contentieuse
            - 6 présidents
            - 3 présidents adjoints de la section du contentieux
            - 4 autres présidents de sous sections.
            - 1 rapporteur
            - 1 Président de l’association.




Ø  Réorganisation des formes administratives consultatives

Lorsque le Gouvernement demande au CE d’examiner un projet de loi ou de décret.
Il y a création d’une nouvelle section administrative, appelée section de l’administration, qui s’ajoute aux 5 autres sections administratives, mais avec des compétences spécialisées, comme :
- Les finances
- L’intérieur
- Des travaux publics,
- Des questions sociales
- Du rapport et des études : elle publie des études, avec un pouvoir d’injonction

L’organisation interne des sections administratives, est calquée sur celle du contentieux.

Ø  Séparation des deux formations administratives qui sont désormais clairement séparées.


Les membres du CE, peuvent appartenir à la fois, à des formations administratives, et à la formation contentieuse. Certains n’appartiennent qu’à une catégorie, d’autres changent.

Le décret du mars 2008, Art R122-21, du code de la justice administration : Le décret prévoit que les membres du CE ayant participé à la délibération d’un acte pris après avis du CE, ne peuvent pas participer à une formation contentieuse, statuant sur un recours dirigé contre cet acte.

En pratique, les magistrats s’interdisaient eux-mêmes auparavant.

Une liste des membres ayant participé à la délibération de l’avis peut être communiquée.


En ce qui concerne les compétences contentieuses, Le CE a une triple compétence contentieuse, + une compétence d’avis contentieux :

            - Il est compétent en 1er et dernier ressors, il statue souverainement, ce sont des compétences d’attribution :
                        - Cela concerne une partie du contentieux électoral
                        - Contentieux du parlement Européen
                        - Vis-à-vis des demandes d’annulation, vis-à-vis des décrets du Président de la République, ou du 1er ministre
                        - Vis-à-vis des recours contre les décisions administratives prises par des organismes collégiaux à compétences nationales, comme la CNIL.

- En Appel, il a gardé des compétences réduites, comme les élections cantonales. Cette compétence d’Appel permet au CE de rejuger le fond du litige lui-même.

            - Il est juge de cassation pour examiner les arrêts rendus par les Cours administratives d’appel,  et les décisions par les juridictions administratives spéciales (Cours des comptes…).

En aucun cas, le juge de cassation ne rejuge le litige, il regarde seulement la bonne application de la règle de droit par le juge du fond (CAA ou juridictions spécialisées).


La loi du 31 décembre 1987, a mis en place la possibilité au CE de poser des question de droit nouvel, en laissant au CE 3 mois pour rendre un avis contentieux, publié au JO, avis qui ne s’impose pas :
Cela permet de réduire les délais de jugement, et les recours contentieux.

II)                Les juridictions administratives spécialisées

Il y en a une cinquantaine, mais le CE n’en recense qu’une vingtaine, qui sont très variées. Ces juridictions traitent un contentieux particulier, c'est-à-dire dans un domaine précis :
            - Le domaine financier, CRC 1807, qui traite les comptes des comptables.
            - Lorsque certains conseil ou organismes se réunissent en commissions disciplinaire : Sanctionner Etudiant en Enseignant.
            - Même chose pour les ordres professionnels, des médecins par exemples, qui se réunissent (appel puis cassation éventuel).









ü  Conclusion du Chapitre 1 :

Il y a eu une réorganisation de l’ordre juridictionnel administratif, grâce à la mise en place des Cours Administratives d’appel, qui s’est fait en symétrie à l’ordre juridictionnel judiciaire.

Ce n’est pas tellement une question institutionnelle qui se pose en matière de juridiction administratives (supprimer ou pas), mais davantage une réorganisation interne, dans un but constant d’accélérer le cours de la justice, améliorer les règles de bonne administration de la justice, notamment en développant le juge unique, ce qui est le cas pour une partie du contentieux fiscal (mineur).

Les juridictions administratives servent aussi l’intérêt général, grâce au recours pour excès de pouvoir, lorsque le juge annule un acte administratif.










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